Confolens : le bilan du Directeur Artistique
Confolens : ce nom a rythmé toutes nos répétitions depuis septembre 2004. Nous avons travaillé, créé, recherché pour ce festival qui compte parmi les plus prestigieux du monde. Je vous avais demandé de penser, de rêver, de vivre et de respirer du Confolens afin d’être prêt pour ce rendez vous avec l’un des public les plus exigeants qui soit en France. Cela à représenté des milliers d’heures de travail, nombre de week-ends de répétitions, et nombre d’heures de préparation en couture, broderie, musique, recherche ethnomusicologique, ethnochorologique, montage et préparations d’expositions, politique de communication, travail avec les acteurs économiques et investissements des cadres et des danseurs de Bleuniadur. Le festival vient de s’achever, les premiers bilans sont à faire.
Comme dans toute action, ces bilans sont mitigés, et vous trouverez ici quelques commentaires jetés à froid, qui seront par la suite affinés.
Tout d’abord, Confolens c’est la rencontre avec des hommes et des femmes d’exception. Nous avons côtoyé et échangé avec des danseurs de tous les pays, absolument extraordinaires, souvent fabuleux sur scène et d’un contact humain chaleureux et délicieux. Ceci nous a permis de découvrir et de connaître non seulement des répertoires de danse et de musique, mais en plus de partager avec leurs interprètes des moments de rencontre et de partage de joie intense, c’est une parcelle de chacun des pays présents que nous partagions, au plus profond de l’âme de ces pays.
Confolens, c’est la rencontre avec Henri Coursaget. Vous avez pu constater, comme moi, l’immensité de cet homme, dans sa foi dans les hommes et leurs cultures, dans son aura personnelle, dans sa façon d’aimer et de faire aimer les peuples et les gens entre eux. Vous avez comme moi apprécié son immense gentillesse et compassion. Cet homme est dangereux, il est contagieux : à son contact on se sent plus grand, plus ouvert, et plus rien n’est impossible. Dans votre vie, cet homme fera sans nul doute partie des hommes qui comptent , qui marquent, qui orientent des destins. Vous pourrez dire : « j’ai connu Henri Coursaget » et en être fier.
Autre rencontre, celle avec le directeur du Festival, Philippe Beaussant. On l’a souvent vu en retrait d’Henri et, lors du festival, nous avons pu apprécier sa gentillesse, sa fermeté et nous avons découvert un grand directeur, à la fois complémentaire du fondateur du festival, et visionnaire quand à l’évolution de Confolens, qui allie à la nécessité de faire tourner la machine, le fait de la rendre humaine et de consacrer un moment, un mot une attention aux acteurs du Festival.
Si je vous dis Martine et Emmanuelle, cela vous évoquera sans nul doute beaucoup d’émotion, mais aussi compétence, générosité, dynamisme et dévouement. Oui, les meilleures guides que nous n’ayons jamais eues sur un festival depuis longtemps sont françaises. Les guides de Kolobrzeg nous avaient jusqu’à présent laissé le meilleur souvenir, les guides de cette année ont été extraordinaires. Alors que le groupe arrivait à Confolens avec un sentiment mitigé (j’y reviendrai plus tard), elles ont réussi à remettre le groupe en selle et à lui faire aimer le festival et à y trouver sa place. Encore une fois grand merci à elles et aux autres guides du CIOFF France qui se dévouent sans compter pour le bien être des groupes et la réussite des festivals.
Vous avez comme moi apprécié l’efficacité et la qualité de travail des techniciens son et lumière lors des spectacles, leur professionnalisme et là aussi leur gentillesse et la qualité de leurs contacts humains. Avant de partir nous avons aussi remercié les trois présentateurs, qui introduisaient nos prestations : poésie des textes, respect de notre culture, excellente synthèse de notre travail et de ce que nous sommes sur scène. Ces amateurs sont de vrai pros.
C’est aussi la rencontre avec Zoran qui nous a permis de développer un atelier où nous avons pu rencontrer des festivaliers et leur faire connaître notre répertoire de musique et de danse et mettre en place un atelier lecture chorégraphique sur notre approche de la mise en scène.
Il va sans dire que nous nous devons également de remercier les centaines de bénévoles qui assuraient la logistique du festival, restauration, hébergement, entrées, etc.… Nous n’avons jusqu’à présent jamais fréquenté, sur une longue durée, un festival où les bénévoles étaient aussi pro, où tout problème trouvait une solution et ce dans une ambiance d’accueil et de convivialité toujours présente malgré la fatigue, la charge de travail ou les horaires décalés. Ces bénévoles sont à prendre en exemple et j’espère que vous vous en inspirerez dans vos engagements respectifs.
Alors vous allez me dire, ce festival aurait dû être un rêve, un moment de bonheur frisant la perfection, et pourtant cela ne l’a pas totalement été, au moins au début du festival. Qu’est ce qui a coincé pour qu’il en soit ainsi ? Comme vous le savez, Confolens c’est aussi une équipe de programmation et c’est là que ça a coincé, en ce qui nous concerne. Je ne parlerai pas pour les autres groupes, même si les échanges que nous avons pu avoir allaient dans ce même sens.
Nous avons pu constater que cette équipe forme une secte, un Etat dans l’Etat, un clan dans le festival, et ne présente pas les caractéristiques et l’esprit dégagé par le restant du festival. Ici, pas d’accueil, pas la moindre politesse, pas le moindre bonjour, merci ou s’il vous plait. Des danseurs traités comme des débiles à la limite comme des chiens, une équipe qui manifestement n’avait jamais visionnés notre DVD de démonstration. Une équipe qui n’a eu de cesse de nous harceler, souvenez-vous le nombre de fois où nous avons été interpellés en répétition, alors que presque toujours ce n’était pas de notre groupe qui s’agissait. Certes, notre invitation à Confolens n’était pas de leur fait, certes certain d’entre eux « n’aiment pas les bretons » et si ça n’avait tenu qu’à eux nous n’aurions jamais été invités. Mais voilà l’invitation avait été faite par Henri et nous avions décidé de l’honorer et nous avons tenu en bon Bretons léonards que nous sommes notre parole et notre engagement, et ce malgré les autres propositions alléchantes qui nous avaient été fait en cours d’année (je pense ici à la création à Martigues et à la tournée en Hongrie où nous rêvons d’aller depuis plusieurs années). Je vous avait demandé de faire fi ce cet état de fait et de vivre le festival au mieux, en donnant qualité sur scène, politesse, exactitude et gentillesse, ce que vous avez fait. Je sais que certains ont trouvé cela dur. C’est vrai qu’en plus d’être désagréable l’équipe de programmation n’était pas performante dans les répétitions et dans leur mise en scène qui date des années 1970, que ce soit en ouverture, clôture ou fresque, et que leur travail est loin des nuits magiques de Lorient ou d’autres festivals auxquels nous avons participés, qu’on est venu avec une Rolls et qu’ils ne savaient conduire qu’une Deux-chevaux, mais c’est du fait de garder ses engagements, de garder le cap, de rester ce qu’on est quelque soient les circonstances qui permet de grandir et de ce dépasser, et cela vous avez su le faire. Je sais que le fait de ne pas vouloir nous communiquer les durées exactes de passage nous ont obligé sur le festival à travailler et faire des adaptations au répertoire de musique et de danse, que cela a rajouté à votre fatigue, mais vous l’avez fait sans rechigner et je vous en remercie. N’oubliez pas ce que je vous ai écrit plus haut dans ce texte, la grandeur est contagieuse, et l’on se doit d’être grand.
Alors, me direz vous, qu’est ce que j’ai pensé de Bleuniadur à Confolens ? En ce qui me concerne, j’ai été satisfait du groupe dans son comportement, sa discipline et fier de ses prestations. En ce qui concerne, l’organisation générale a parfaitement fonctionnée. Les responsables ont été présents et à la hauteur de leur tâche, y compris les nouveaux, les jeunes qui commençaient cette année. Les danseurs ont été, dans leur comportement hors de scène, à la hauteur de ce qu’on leur avait demandé, et sur scène ils ont été au mieux de leurs possibilités. Je tiens ici à redire encore une fois aux filles les progrès énormes en technique et en présence qu’elles ont réalisé cette année, tout en n’oubliant pas les garçons sur qui j’ai toujours pu compter. Le groupe en a gagné en technique, puissance et cohésion.
Alors Confolens c’était comment ?
De Confolens on va en garder l’image d’un grand festival, ou l’on est bien accueilli par l’équipe du festival, on va en garder ces moment d’échange, ces fabuleux moments d’émotion, repensez aux larmes de bonheur partagé avec l’Uruguay et les Tchouktches lors de la soirée nuit en fête – une petite pensée particulière pour Jean Michel - repensez aux retrouvailles avec Panama, aux échanges avec l’Afrique du Sud, repensez aux échanges avec les bénévoles et les cadres du festival, les retrouvailles avec les cadres des festivals qui nous ont déjà reçus en France et qui étaient présents à Confolens.
De Confolens on va garder l’image d’un Bleuniadur soudé, capable de prendre sur lui et de faire partager au public sa joie, sa bonne humeur et de faire reconnaître sa culture à un niveau artistique rarement présenté par nombre de groupes bretons, d’une extraordinaire complicité entre les musiciens et les danseurs du groupe.
De Confolens on va garder aussi l’image d’un rendez–vous manqué avec la scène, et de rencontres non achevées avec certains groupes. Les regrets de l’Uruguay de n’avoir pas pu échanger un moment de création avec nous a encore rajouté à ce sentiment.
De Confolens on va garder nos rencontres avec le public qui en redemandait toujours, nous interpellant dans la rue par des mots ou des remarques empreintes de gentillesse et d’encouragement. On va garder aussi cette chose extraordinaire que des publics qui nous ont vus dans d’autres festival viennent spécialement à Confolens pour nous voir, et ceux qui n’en n’avaient pas vu assez à Confolens et qui sont venus en délégation voir notre spectacle de La Forêt Fouesnant. C’est une chose à peine imaginable, cela me laisse pantois.
De Confolens on gardera aussi le nombre d’invitations à des festivals qui nous ont été faites tant en France qu’à l’étranger. Nous garderons l’augmentation des visites sur notre site, nous garderons les messages et les articles, les opinions qui fleurissent sur différents sites consacrés aux arts traditionnels, nous garderons le souvenir d’un passage. Je vous disais « il y a un avant et un après Confolens », en ce qui nous concerne j’estime que ce passage a été réussi.
Pour conclure, je voudrai vous remercier tous pour cet engagement important que vous avez réalisé pour ce festival, et je voudrais vous rappeler que si cela a été possible, en plus de votre travail c’est aussi grâce aux festivals CIOFF de Montoire, de Gannat, de Reims, de Saint Maixent-l’Ecole, de Felletin, de Saintes, de Concarneau, de Plozévet, de Martigues qui nous ont fait confiance et plus que jamais nous nous devons de porter haut les valeurs promues par ces festivals et le Cioff France, qui sont complémentaires des valeurs d’ouverture et de grandeur que je vous demande mettre en œuvre.
Merci à tous et à chacun.
Alain Salou
Directeur artistique de Bleuniadur.